Le gisement magdalénien du Pré-des-Forges, à Marsangy, implanté sur la basse terrasse de l'Yonne, est contenu dans un limon de débordement recouvrant les alluvions de fond de vallée. Le limon dessine un bourrelet de crue sur lequel les Magdal6niens ont établi leur campement, en bordure de la berge fossile. Sept foyers ont été mis au jour mais seules les quatre structures centrales font l'objet de cette étude.
La faune, mal conservée, montre l'association dominante du cheval et du renne (cerf rare). L'analyse malacologique met en évidence un type d'association (à Pupilla muscorum) caractéristique de la plaine loessique glaciaire. Les dates radiométriques ne sont pas absolument concordantes(entre 12 100 et 11 600 BP) mais l'analyse des données de l'environnement permet d'envisager une attribution à la transition DryasII/Alleröd.
L'organisation de l'espace se fait autour de 4 structures centrées chacune sur un foyer. La plus originale est l'unité N19 (ensemble I), atelier de débitage spécialisé, constitué de plusieurs amas représentant des postes de travail individuels. Les unités Hl7 et Dl4 semblent des emplacements de tente, proches du modèle de Pincevent, tandis que l’unité X18 constitue une installation annexe complémentaire des habitations principales (pour l'analyse, ces 3 unités sont regroupées sous la dénomination "d'ensemble II").
Les activités liées au travail du silex étaient prépondérantes. Les Magdaléniens sont venus de Marsangy pour ramasser les nodules de silex présents dans les alluvions et dans les affleurements crétacés du voisinage. Ils ont débité le silex qu'ils avaient collecté pour se procurer les supports laminaires nécessaires à la fabrication de leur outillage. Le facettage en éperon des talons se pratiquait de façon systématique. Si les Magdaléniens ont emmené les percuteurs tendres dont ils se servaient pour le détachement des lames, on a retrouvé quelques galets portant des traces de percussion, utilisés pour la mise en forme des nucléus.
Comme toujours au Magdalénien, les burins sont les outils les mieux représentés. Mais l'abondance des becs et perçoirs et la fréquence des éléments terminés par une troncature retouchée sont caractéristiques de l'industrie lithique de Marsangy. La prédominance des burins et des becs laisse supposer que le travail des matières dures animales était un domaine important de l'activité. Une autre particularité est l'association des lamelles à dos et d'armatures de silex pointues (pointes à dos courbe et surtout pointes à cran ou à dos anguleux) ; c'est le témoignage de techniques de chasse diversifiées.
Les témoins esthétiques sont rares mais non sans intérêt : Rognon de silex en forme de statuette féminine, cortex gravé de traits parallèles et de motifs pisciformes, coquille perforée.
Les occupants de Marsangy appartiennent à la tradition magdalénienne des grands habitats de plein air de l'Ile-de-France, autant par leur mode de vie que par leur équipement et leurs habitudes techniques. Toutefois, ces Magdaléniens ont subi des influences septentrionales qui se manifestent par la présence de pointes à cran et de zinken caractéristiques, en particulier, du complexe creswello-hambourgien. Par là, Marsangy tient une place particulière dans le Magdalénien du Bassin Parisien.