Des lamelles retouchées au Châtelperronien : diffusion d'idées entre derniers Néandertaliens et premiers Hommes modernes migrants

p. 491-511

Résumés

The Châtelperronian, one techno-complexes of the Middle to Upper Paleolithic change-over in Europe, shows an uncommon association of a specific leptolithic industry with Neanderthal human remains, pendants, pigments and bone-tools. Several hypothesis had been put forward to explain this association : acculturation, independent evolution or even post-depositional mixing. Here, we present results from the Quinçay lithics’ analysis, the only Châtelperronian site with several Châtelperronian layers sealed by a large roof fall. No other Upper Paleolithic layers are detected above the sequence. In the three Châtelperronian layers, blades and bladelets are produced. The method of production used is specific to the Châtelperronian, by its unique set of procedures, and is clearly different from the early Upper Palaeolithic leptolithic production or from the Middle Palaeolithic flake production. In this sequence the way to produce long bladelets is typically Châtelperronian, it is identical in its volumetric organization to the one used for blades. However, the retouched bladelets are looking alike Protoaurignacian ones. We argue that this cannot be a convergence neither a coincidence, and that instead this is evidence of superficial contact, maybe even at distance, between Châtelperronian and Protoaurignacian groups. The idea and morphology of the retouched bladelets had been borrowed by Châtelperronian groups from Protoaurignacian groups, maybe only by seeing hunting weapons equipped with such bladelets on pathways. Meanwhile the specific method used by Protoaurignacian groups to produce bladelets remained unused (and was probably unknown). This is consistent with the stimulus diffusion model. Our results suggest that the Châtelperronian and the Protoaurignacian had been contemporaneous, but were only superficially connected. Social intimacy between the two groups might have been quite low.

Le Châtelperronien est l’un des techno-complexes marquant le passage du Paléolithique moyen au Paléolithique supérieur en Europe occidentale. Il montre l’association d'une industrie leptolithique spécifique avec des restes humains néandertaliens, des objets de parure, des pigments et de l’industrie osseuse. Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer cette association : acculturation, évolution indépendante ou encore mélanges post-dépositionnels. Nous présentons ici les résultats de l'analyse lithique de la séquence de Quinçay. Il est le seul gisement châtelperronien en grotte contenant plusieurs niveaux de cette industrie en séquence, scellés par un effondrement massif de la voûte. Aucun autre niveau du Paléolithique supérieur n’est détecté au-dessus de la séquence. Dans les trois niveaux, l’objectif de la production est orienté vers l’obtention de lames et de lamelles. La méthode de production utilisée est spécifiquement châtelperronienne et est clairement différente de la production leptolithique du début du Paléolithique supérieur ou de la production d’éclats du Paléolithique moyen. La méthode de production de longues lamelles est caractéristique du Châtelperronien, elle est identique dans son organisation volumétrique à celle utilisée pour les lames. Cependant, les lamelles retouchées sont typologiquement comparables à celles rencontrées en contexte protoaurignacien. Selon nous, cette donnée n’est pas le résultat de convergence ou de coïncidence, mais suggère un contact superficiel, à distance, entre groupes châtelperroniens et protoaurignaciens. L'idée « lamelles retouchées » a pu être empruntée par les Châtelperroniens en observant de telles lamelles armées sur des projectiles abandonnés sur des lieux de passage partagés. La méthode protoaurignacienne de production de lamelles n’est pas utilisée par les Châtelperroniens de Quinçay et elle leur était probablement inconnue. Ceci est cohérent avec le modèle de diffusion par stimulus. Nos résultats suggèrent la contemporanéité du Châtelperronien et du Protoaurignacien. Ces deux groupes n’ayant été que superficiellement connectés, leur intimité sociale reste donc assez faible.

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Référence papier

Morgan Roussel, « Des lamelles retouchées au Châtelperronien : diffusion d'idées entre derniers Néandertaliens et premiers Hommes modernes migrants », ERAUL, 140 | 2014, 491-511.

Référence électronique

Morgan Roussel, « Des lamelles retouchées au Châtelperronien : diffusion d'idées entre derniers Néandertaliens et premiers Hommes modernes migrants », ERAUL [En ligne], 140 | 2014, mis en ligne le 22 November 2024, consulté le 10 January 2025. URL : http://popups.lib.uliege.be/3041-5527/index.php?id=311

Auteur

Morgan Roussel

Leiden University, Faculty of Archaeology, Human Origins research group, The Netherlands